Les gîtes du castor
Le lieu le plus important dans un territoire de castor, son coeur, c'est le gîte. Les chemins d'eau et de terre y mènent tous et les barrages n'en sont que la dépendance ou l'extension. Les animaux s'y réfugient au moindre danger et c'est là qu'ils passent la plus grande partie de leur existence. Il existe toute une gamme d'abris, depuis le simple terrier à une seule galerie d'accès jusqu'au dôme entouré d'eau que l'on appelle hutte, car les castors témoignent d'une remarquable ingéniosité à adapter leurs constructions à la nature du sol.
Le gîte sert également de réserve alimentaire.
La cavité
Qu'elle soit naturelle ou artificielle, toute cavité de volume suffisant, située au bord de l'eau, représente un abri potentiel à castor.
Cavité naturelle : du simple abri sous roche, au véritable réseau souterrain, toutes les configurations sont tolérées dans la mesure où le castor peut y pénétrer et y séjourner au sec.
Cavité artificielle : mur miné à sa base, conduit souterrain, puit, les facultés d'adaptation du castor sont immenses et toutes sortes de cavités peuvent lui convenir.
Le terrier
Un terrier est une cavité creusée dans le sol par l'animal. Trois conditions sont nécessaires à l'établissement d'un terrier :
- la pente de la berge doit être assez importante (plus de 30°)
- l'ensemble des caractères qui assurent la tenue du terrier (texture, état d'enracinement) doit pouvoir après le creusement prévenir les éboulements, l'infiltration des eaux.
- tout ou partie de l'entrée du terrier doit en principe rester immergée.
Ainsi la galerie d'accès débouche sous l'eau et est en partie envahie par elle. Il peut en exister plusieurs. Toutes mènent à une première chambre qui joue le rôle de vestibule, où le castor se débarrasse de l'eau qui imprègne sa fourrure. Au vestibule fait suite la chambre d'habitation, en position surélevée, où vit la famille. Une ouverture aménagée dans le plafond assure une ventilation suffisante. L'ensemble est recouvert de branchages enchevêtrés qui masquent l'ouverture de la cheminée d'aération et les issues des galeries d'accès. Ce tas de braches, appelé "fagotière", n'est pas cimentée par de la boue. Il semble protéger le terrier des prédateurs et dirige l'écoulement de l'eau de pluie hors de l'habitation.
La longueur totale de la galerie ne dépasse pas les dix mètres. Le diamètre est de 30 à 50 cm. La chambre a généralement un diamètre de 50 à 80 cm et une hauteur de 40 à 60 cm.
Le terrier-hutte
Lorsque l'une des trois conditions énoncées comme étant nécessaires à l'établissement d'un terrier ne sont pas (ou plus) remplies, le castor supplée à ce qui lui fait défaut par un apport de matériaux. D'où un modèle de construction très composite que l'on appelle terrier-hutte.
En général, les problèmes rencontrés par le castor et qui l'amènent à construire un terrier-hutte sont les suivants :
- baisse du niveau de l'eau
- mauvaise tenue du sol
- épaisseur de berge trop faible (manque de matière)
La hutte
Lorsque les berges sont telles qu'aucune opération de fouissage ne puisse être entreprise, lorsqu'aucune cavité n'y est présente, le castor construit alors une hutte. Il doit alors tout construire, y compris la plateforme émergée sur laquelle il établira la pièce principale : la chambre. Les dimensions d'une hutte peuvent atteindre 4 à 5 m à la base et 2 m de hauteur. Plusieurs conduits d'accès peuvent mener à la chambre.
De telles constructions sont rarissimes dans la vallée du Rhône, où le castor dispose d'autres possibilités de gîtes.
L'aspect extérieur de ces huttes est celui d'une demi-sphère hérissée de brindilles. Les parois ont une épaisseur moyenne de 30 cm. Le sommet de la hutte est en général à 1m au-dessus de l'eau, mais cette hauteur est variable car les générations successives de castors déposent des déchets sur le sol de la chambre d'habitation ce qui nécessite d'en rehausser périodiquement le toit. Le diamètre est variable, pour les mêmes raisons, et en moyenne de 2,50 m.
Ces huttes conservent la chaleur, grâce à la toiture isolante, et la température y est à peu près constante et douce et il n'est pas rare, par temps froids, de voir s'échapper de la vapeur par les trous d'aération qui les surmontent.
Les gîtes temporaires
Lors de crues importantes inondant leur gîte, les castors peuvent être amenés à se satisfaire d'un abri temporaire et improvisé. Ils se contenteront alors d'un simple abri sous roche situé à plusieurs mètres du plan d'eau, voire d'une simple couche à ciel ouvert, ou encore d'un abri provisoire sur le toit de leur hutte.
Les matériaux employés dans l'édification des huttes et des terriers-huttes
Le bois constitue bien évidemment le matériau de base dans la construction des huttes et terriers-huttes. Ce peut être du bois fraîchement coupé par le castor ou bien récupéré au fond de l'eau ou sur les berges. En dehors du bois, tout ce qui est accessible au castor peut servir : plaques de polyester, vieux bidons d'huile, planches... Le castor utilise également du sable et de la boue, notamment pour colmater les brèches, que ce soit sur sa hutte ou sur un barrage.
La litière
Les castors tapissent le sol de leur chambre de longues échardes de bois débitées à l'intérieur même du gîte. Cette couche protectrice isole les animaux de l'humidité. les litières sont régulièrement changées. Les vieilles litières sont alors sorties et abandonnées, tandis qu'une autre est installée en remplacement.
Eléments intervenant dans le choix de l'emplacement d'un gîte
Les gîtes sont généralement situés à proximité des zones de nourrissage. Le courant du cours d'eau à l'entrée du gîte doit être nul ou très lent.
D'après le dossier "castor d'Europe" de l'ASPAS